Emploi dans l'agriculture : des opportunités pour les personnes en situation de handicap ?


Le visage de l’agriculture française continue d’évoluer
Tous les dix ans, en France comme dans le reste de l’Union européenne, on évalue le nombre d’agriculteurs. En France, depuis les années 1970, l’érosion du nombre d’exploitations agricoles se poursuit. Les chiffres du Recensement Agricole (RA, source Agreste) 2020, indiquent qu’il y a sur le territoire métropolitain, 389 800 exploitations agricoles, contre 480 000 dix ans plus tôt (voir graphique). La baisse est moins prononcée entre 2010 et 2020 (– 2,3 %) que lors des recensements de 2000 et de 2010 (– 3 %). A ce chiffre, il convient d’ajouter les 26 700 exploitations agricoles des Départements d’Outre-Mer, ce qui porte le nombre total national à 416 500.
Au gré des années, ce sont les éleveurs qui ont payé un lourd tribut à cette diminution du nombre d’exploitations agricoles. Le recul des exploitations spécialisées en productions animales s’élève à – 5,7 %, alors que celles à orientations végétales s’accroissent de + 6,6 %. Le recul est particulièrement prononcé en ovins et caprins, ainsi qu’en bovins lait et en bovins viande.
Moins nombreux, les exploitants agricoles sont aussi plus âgés. La moitié d’entre eux ont en effet plus de 55 ans. Pour ceux qui ont plus de 60 ans, un tiers d’entre eux déclare ne pas envisager de cesser leur activité.
L’une des principales contreparties de cette évolution réside dans la hausse de la superficie moyenne des exploitations agricoles en France métropolitaine. Elle se situait à 20 hectares en 1970, à 40 en 2000, et atteint en 2020 70 hectares. Il en découle que la taille économique des exploitations agricoles, mesurée par l’indicateur de Production brute standard (PBS, sorte de chiffre d’affaires de l’exploitation), s’accroît. Les grandes exploitations représentent désormais une exploitation sur cinq. Toutes les autres catégories enregistrent une diminution.
La transformation de l’agriculture française a également trait à l’augmentation du nombre de salariés permanents non familiaux. 21 % du volume de travail (ETP) réalisés dans les exploitations sont dus au salariat permanent non familial (11% par une main-d’œuvre saisonnière ou occasionnelle).
Moins nombreux, les agriculteurs français sont aussi mieux qualifiés. 55% d’entre eux détiennent en effet un diplôme supérieur ou égale au baccalauréat (ils n’étaient que 38 % en 2010), et 27% déclarent détenir un diplôme de l’enseignement supérieur (17% dix ans plus tôt).
On observe également une croissance du nombre des exploitations agricoles vendant en circuit court. En 2020, la vente en circuit court touche près d’un quart des exploitations sur le territoire métropolitain (90 000 exploitations), allant jusqu’à la moitié pour celles qui sont en orientation agriculture biologique. L’essentiel concerne l’apiculture, l’horticulture, les fruits et les légumes, ainsi que la polyculture-polyélevage. Les ventes s’effectuent directement à la ferme pour 57 697 exploitations, sur un marché pour 4 900 d’entre elles, et en passant par un commerçant détaillant pour 4 116.
Ce secteur de l'économie, qui comprend les cultures, l'élevage, la chasse, la pêche et la sylviculture, emploie 722 000 personnes en 2022[1] soit 2,5% de l’ensemble des personnes en emploi. Il s’agit d’une population majoritairement masculine (7 personnes sur 10) et relativement âgée (près d’une personne sur deux ayant 50 ans ou plus). Par ailleurs, 8,3% des actifs en emploi de l’agriculture sont pluriactifs et exercent donc une autre activité, salariée ou non.
Des opportunités d’emploi aujourd’hui et demain
Culture de céréales, de légumes, de fleurs, de la vigne, élevage d’animaux, entretien de la forêt, production de lait et d’alcool, … les opportunités d’emploi sont nombreuses et variées.
Chaque année, 50 000 personnes sont recrutées en lien avec l’agrandissement des exploitations, les contraintes sanitaires de plus en plus fortes et la mise aux normes des exploitations. Chaque année également, près de 12 000 emplois ne sont pas pourvus dans le secteur agricole concernant essentiellement des postes d’agent d’élevage, d’ouvrier agricole ou viticole, d’agent d’entretien d’espaces verts, …
La famille de métiers « agriculteurs, éleveurs, sylviculteurs, bûcherons » figure parmi les 15 où les déséquilibres sont les plus importants d’ici 2030 entre les besoins de recrutements liés aux nombreux départs en fin de carrière et le nombre de jeunes débutants[2].
Ces métiers se caractérisent par la maturité des personnels qui les occupent mais également par une faible attractivité pour les débutants : ils ne devraient pas avoir un vivier de recrutement suffisant pour compenser les départs des seniors. Si la faible attractivité de certains métiers, souvent peu qualifiés, pose la question de leurs conditions de travail (pénibilité, non-durabilité de l’emploi) et de rémunération, ce sont aussi des métiers qui recrutent plus souvent des chômeurs et qui constituent des voies d’insertion pour les personnes handicapées.
Pourquoi s’intéresser à ce secteur quand on est handicapé ?
Raison n°1 : L’évolution des matériels utilisés, l’introduction de nouvelles technologies mais également les progrès réalisés en matière de sécurité et de conditions de travail rendent certains métiers et certains postes moins contraignants physiquement. Les robots agricoles sont par exemple de plus en plus utilisés dans les exploitations agricoles : ce sont des machines autonomes capables d’effectuer des tâches agricoles, telles que la traite des vaches, la récolte des fruits et légumes, ou encore le désherbage.
Raison n°2 : Le secteur agricole évolue et propose des emplois dans des métiers dont les contraintes physiques peuvent être moins fortes, notamment grâce à la mécanisation et permettent de valoriser une expérience acquise dans d’autres domaines. Ainsi les métiers de la vente, de la maintenance du matériel agricole ou du conditionnement peuvent être des pistes à envisager dans le cadre d’un reclassement professionnel.
Raison n°3 : Les entreprises et exploitations du secteur agricole sont, pour une majeure partie d’entre elles, à taille humaine et accordent une place importante aux valeurs de solidarité et de respect mutuel. Un contexte favorable pour démontrer ses capacités et son envie de travailler, bien loin des idées reçues sur le handicap.
Une mobilisation dans les territoires au plus près des entreprises
De nombreux défis restent à surmonter parmi lesquels les préjugés sur les compétences des personnes en situation de handicap dans le milieu agricole, le manque d’information des personnes comme des employeurs ou encore des formations non adaptées.
Pour y répondre, l’Agefiph et l’opérateur de compétences OCAPIAT ont conclu en janvier 2022 un partenariat afin d’informer et de sensibiliser celles et ceux en mesure de former et d’embaucher des travailleurs en situation de handicap pour les inciter à passer à l’action, notamment à travers des dispositifs d’apprentissage, de professionnalisation et de préparation opérationnelle à l’emploi (POE).
Encadré
Quels sont les problèmes de santé déclarés dans l’agriculture ?
Avec près de 50 000 accidents du travail par an, soit 15 % du total enregistré tous secteurs confondus, l’agriculture est l’un des domaines d’activité où le handicap est le plus prégnant. 18 % des travailleurs du secteur de l’agriculture déclarent avoir été malades ou avoir eu des problèmes de santé au cours des 12 derniers mois. Pour 46 % d’entre eux, le travail a causé ou aggravé ce problème de santé. Dans 68 % des cas, le problème de santé principal causé par le travail est très majoritairement d’origine osseuse, articulaire ou musculaire. Les travailleurs dans l’agriculture (ainsi que dans la construction) sont plus souvent exposés à la manipulation de charges lourdes (61 % contre 31 % pour l’ensemble des personnes en emploi) ainsi qu’aux positions fatigantes et douloureuses.
Ressource
"Agriculture : emploi et handicap - Etat des lieux et perspectives" : lien vers la publication de l'observatoire de l'Agefiph (02.2024)
[1] Source Insee, enquête emploi 2022
[2] Projections France Stratégie/Dares